Je m'entête affreusement à adorer la liberté libre

« Charleville, le 2 novembre 1870.

Monsieur,

- A vous seul ceci. –

Je suis rentré à Charleville un jour après vous avoir quitté. Ma Mère m'a reçu, et je suis là... tout à fait oisif. Ma mère ne me mettrait en pension qu'en janvier 71.
Eh bien, j'ai tenu ma promesse.
Je meurs, je me décompose dans la platitude, dans la mauvaiseté, dans la grisaille. Que voulez-vous, je m'entête affreusement à adorer la liberté libre, et... un tas de choses que "ça fait pitié", n'est-ce pas ? Je devais repartir aujourd'hui même ; je le pouvais : j'étais vêtu de neuf, j'aurais vendu ma montre, et vive la liberté ! -Donc je suis resté ! Je suis resté ! - et je voudrai repartir encore bien des fois. - Allons, chapeau, capote, les deux poings dans les poches, et sortons. - Mais je resterai, je resterai. Je n'ai pas promis cela ! Mais je le ferai pour mériter votre affection : vous me l'avez dit. Je la mériterai.
La reconnaissance que je vous ai, je ne saurais pas vous l'exprimer aujourd'hui plus que l'autre jour. Je vous la prouverai ! Il s'agirait de faire quelque chose pour vous, que je mourrais pour le faire, - je vous en donne ma parole.
J'ai encore un tas de choses à dire...

Ce "sans-cœur" de
A. RIMBAUD.


Guerre : pas de siège de Mézières. Pour quand ? On n'en parle pas. J'ai fait votre commission à M. Deverrière, et, s'il faut faire plus, je le ferai. - Par-ci, par-là, des francs-tirades. Abominable prurigo d'idiotisme, tel est l'esprit de la population. On en entend de belles, allez. C'est dissolvant ! »

(Lettre d’Arthur RIMBAUD à son Professeur Georges IZAMBARD, datée du 2 novembre 187O)

La photo est prise devant le Musée RIMBAUD de Charleville, sur le quai, où les « édiles » ont eu la bonne idée de fixer une douzaine de chaises en inoxydable dont l’assise comporte des extraits de poèmes ou de lettres d'A. RIMBAUD.

Comments

[Louisette]

Un poète que l'on ne pourra jamais oublier...comme Verlaine...Bonne fin de mois de septembre.

[jeanne]

un signe amical
tu vas bien j'espère

[chris]

Ma liberté, pourtant je t'ai quittée une nuit de décembre
j'ai déserté les chemins écartés que nous suivions ensemble
Lorsque sans même me méfier les pieds et poings liés
je me suis laissé faire
et je t'ai trahie pour une prison d'amour et sa belle geôlière.
serge Reggiani.
une tres bonne semaine bye

[Martine Schnoering]

a l'occasion de la réactualisation d'un article, je relis mes commentaires : http://www.martineschnoering.com/article-21901090-6.html#anchorComment
Et me revoici dans le blog de Petit Louis, relisant avec un grand plaisir, Rimbaud. Merci pour ces citations en ligne ! celle-ci me convient et me plait tout particulièrement. Et hop ! Un "j'aime"
dans mon Facebook !

[jeanne]

la liberté libre .......
ça me laisse songeuse
belle journée petit louis

[Une passante]

Rimbaud très vite a voulu "connaître"le monde, une belle idée que celle-là! Vivre sa vie, appréhender la nature,les gens,voyager sous prétexte de faire des affaires.
Merci Petit louis de nous donner à connaître ce poète sublime.